En t'agrippant au Crépuscule, dégringolant l'Aube, tournoie encore un peu et remarche dans la direction opposée à celle d'Hier. Souffle fort, arrête-toi souvent et fait demi-tour, revient, cherche mais surtout ne trouve pas. Cherche la fleur fragile, la terre humide, la pluie maîtresse, et rêves-en au désespoir, cherche-les toujours pour ne pas te décevoir. Des yeux sans eau supplient pour toi l'Horizon qui semble moins infini que le Ciel.
Ce voyage absurde et matériel qui seul t’éreinte enfin, et te conduit vers toi-même, voudrait te rappeler sans douceur que tu n'es rien, même pas ta chaire desséchée aux assauts du soleil.

(Exactement !)


Il dérapa et repartit vers le brun charmant qui se découpait dans la brume solaire, chatoyante détresse. Les yeux ébahis et le flanc pulsateur, trébucha maigrement vers cette oasis inespérée. Quoi ?

- Je pensais ... je pensais ... en balbutiant et gémissant, la douleur lui trouant le ventre, et de temps en temps il jetait un œil froid de folie vers cet icône douce et étrange, mais impalpable.

L'idée du désespoir s'imposait à lui avec une fureur ravageuse mais il en perdait la tête et toutes les issues, autant de cul-de-sac, semblaient également la meilleure évasion.

- Sommes-nous encore vivants ?

Il n'osait pas regarder ce qui s'étendait devant eux, cette eau morte et menteuse, ne l'était-elle pas ? Il avait trop cotôyé d'infini, trop d'absurde, un nouvel être était une aubaine à peine croyable en comparaison. Furtivement il glissa son épaule tremblotante contre celle plus foncée qui lui faisait face.

[Rouuu ton RP m'a manqué :3 ]


Les paupières mi-closes, il ne put qu'arpenter fiévreusement les jeux de couleur au beau fixe qui exaltaient la robe de sa trouvaille; rien qu'elle. Enfin. Un objet petit, fini, habité. Songeant qu'il pouvait en faire le tour en un instant. Un objet vivant, qui parlait, lui parlait, réagissait selon une directive spirituelle inconnue mais réconfortante. Un son étrange sonna dans la gorge lustrée de la femelle, imposant à sa respiration saccadée de s'étouffer pour qu'il ne puisse pas en perdre un seul scintillement.

Brûlant d'une sueur froide, il se détacha de ce corps rassurant et plongea son regard azuré d'effroi vers elle. Elle répondait, puis reposait une question, cela, il le comprenait, et y trouva une certaine sérénité. L'échange - qu'importe les circonstances - était-il encore une vérité ?

- Peur ? Je ... Oui, bien sûr, j'ai peur, répondit-il à mi-voix comme s'il craignait que quelqu'un d'autre qu'elle l'entende. Sa voix tressautait faiblement, un peu rauque.
Il la détailla fébrilement, elle lui apparaissait bien ferme, mais aussi légère, comme en plein vol, elle était charmante ... chaude. Brisé d'un remord oublié, il se hâta de presser à nouveau le haut de son épaule contre une parcelle de sa peau, son sang bouleversé obéissant subitement à la pulsation dynamique et plus régulière de son interlocutrice.

- J'ai peur de tout ... souffla-t-il, désemparé. Avez-vous peur de moi ?

( )


A la manière d'un enfant, il releva doucement les yeux à ces paroles posées qui se dissipaient naturellement dans l'atmosphère tiède. Elle était solidement charpentée, à peine plus petite que lui, mais la féminité s'évaporait gracieusement dans ses courbes pudiques. Lui était plus délabré malgré l'élan fougueux que la jeunesse sculptait contre ses muscles. Il eut un mouvement de tête anxieux, ne désirant pas évoquer ce qui était un passé embué, si c'était du moins ce qu'elle entendait par ses derniers mots.

Le mâle ferma les yeux, essayant de focaliser ses sens sur le parfum floral qui se dégageait de l'être apaisant et fortuit. Sur sa présence. Qui tournait légèrement autour de lui pour prendre un nouvel angle.

Lorsqu'il les rouvrit ils retombèrent sur l'immense étendue d'eau. Dans un glapissement d'effroi il décala ses hanches affolées et se rattacha à cet unique élément complexe, tournant le dos à la rive meurtrière.
Une bouffée de chaleur comprima sa pensée. Ils naviguaient, seules images animées, dans un cosmos infini et figé. Dans un maigre, imperceptible sourire navré, il répondit.

- Je suis déjà fou, mais restez ... je vous en prie, restez. J'ai moins peur si vous êtes là, pensait-il. Vous êtes réelle ... votre présence ... pas une imposture, n'est-ce pas ? Sa voix s'affermissait mais demeurait invocatrice. Ainsi il ne la perdrait pas.

(agréable surprise :D je réponds pour le plaisir héhé!)


Ses grands yeux brun clair se dilatèrent lentement en débarquant dans le regard de son interlocutrice. Un vent sourd gémit au-delà de la crique mais il était lui-même sourd à tout élément ne provenant pas de la source à laquelle il venait de s'abreuver. Essayant de remonter le fil de ce regard, d'en soulever les voiles, atteindre le ruban argenté de sa pensée, et finalement se retrouver au cœur de soi-même. Captif de sa propre existence.

- Pas de déception pour ceux que l'espoir a chassé, répondit-il froidement, comme une phrase qu'il aurait ressassée longtemps dans sa tête, la phrase d'un fou qui se croit lucide un temps. Seulement l'angoisse. Puis son expression se libéra brutalement de ce froid rugueux et s'adoucit fiévreusement. Le ciel est une imposture, et toutes ses myriades d'étoiles, l'océan, le sol sous nos pieds et ses profondeurs animées ... en peuplant ces étendues factices nous en sommes les victimes, n'est-ce pas ? Si vous vous croyez l'imposture de vous-même, vous serez à mes yeux une violente vérité. Et il débitait des bribes amorphes, vestiges pantelants d'un passé qui fut plus glorieux.

Ses genoux perdaient sans cesse leur équilibre, il titubait sur lui-même, mal à l'aise dans son propre corps. Son buste s'inclina dangereusement vers elle, il la percuta, se repositionna, ses naseaux effleurant encore l'épaule soyeuse de sa congénère. Son regard s'affola.

- Que dîtes-vous ... mon nom ? Je ne sais pas ... je ne sais plus, je suis moi, vous me voyez, vous me reconnaitriez, n'est-ce pas? je suis juste ceci, une image pour vous, je ne sais rien d'autre ... Angoisses.

Il parcourut son être; ... la trouva subitement belle. D'une beauté telle, d'un éclat tel, c'était rassurant, c'était doux.