Erreur système , erreur système .
Une telle chose ne pouvait pas exister . Ça dépassait les lois de la nature et de la raison . Eijil se dit qu'elle devait rêver . Mais , son esprit , bien trop rationnel pour croire à une illusion , lui arracha un sourire . Même moi , même morte , je n'y croyais pas . Ah , je ne me suis pas présentée . En fait , c'est moi qui raconte toutes les aventures d'Eijil . Je suis N'alizée , sa mère . Et je suis morte . Mais ça , c'est du passé , concentrons - nous sur le présent . Après de longues heures d'escalade , Eijil se trouvait face au monde . Le paysage , d'une beauté à lui en couper le souffle , elle pourtant peu impressionnable , était enneigé . D'un coté on voyait des montagnes dont les sommets , recouvert de neiges éternelles , se perdaient dans les nuages , de l'autre , les terres des chevaux ; d'innombrables lieux merveilleux ou terribles , glacials ou brulants , jaunes ou bleu , secs ou humides s'étendait devant ses yeux . Eijil passa un loin moment à fixer le paysage , essayant de déchiffrer cette beauté incomparable , voulant absolument tout voir , jusqu'au poulain tétant sa mère , jusqu'à l'étalon en quête de son destin , jusqu'au plus minuscule insecte . Ses yeux noirs insondables passaient sur chaque parcelle de terrain , cherchant la moindre vie , la moindre présence . Quand enfin elle fut certaine d'être seule et non observée , elle se retourna face aux montagnes .

L'air frais faisait voler ses crins , lui donnant un air d'ange déchu ou de démon innocent . Campée sur ses pattes , les muscles détendus , elle admirait , étonnée par tant de grâce , de beauté , de solitude . Alors , elle posa un genou au sol en tendant bien loin l'autre antérieur et baissa la tête jusqu'à ce qu'elle touche le sol . Une fine larme coula sur sa joue , que la brise du matin sécha . Une larme d'admiration , une larme de joie , une larme d'émerveillement , une larme d'émotion , une larme de gratitude . Une seule petite larme , qui , en cet matinée fraiche , en haut des montagnes , était tout à fait à sa place . Évidente , pour ainsi dire .

Eijil , toujours dans sa révérence , roula un peu plus l'encolure , tirant un peu plus sur les muscles de son dos qui hurlaient déjà de douleur . La douleur allait passer , elle le savait . L'instant était bien trop magique pour laisser une simple crampe le briser . Alors , elle tira encore , ferma les yeux . Très fort . Puis , très lentement , elle se releva , les paupières toujours closes . J'ai beaucoup d'admiration pour cette fille , et pas seulement parce que c'est la mienne . Elle à tout . Vraiment . Elle à l'intelligence , la force , l'humilité , la grâce , le charme , la beauté aussi . Même si l'humour n'était pas son fort , tout son être n'était que poésie . A l'instant où elle décolla les paupières , le soleil émergea de derrière les montages .

Eijil arrêta de respirer . La boule de feu passa doucement , juste entre deux montagnes , colorant l'univers de nuances orangées . Elle se retourna dans un souffle , juste à temps pour apercevoir le monde ce réveiller . Sur la tranche de la colline , une nuée d'oiseaux aux couleurs exotiques s'envolèrent , tandis que des poulain déboulaient dans un champs , des kilomètres plus loin . Elle les regarda un moment se chamailler , mi - amusée mi - envieuse . Depuis combien de temps n'avait - elle pas rit ? Quelques jours , certes . Mais , depuis combien de temps ne s'était - elle pas amusée , au delà des limites de temps ? Le vent lui souffla la réponse à l'oreille , étirant un doux sourire sur ses lèvres . A chacun son bonheur . Le sien , elle le trouvait dans la poésie , dans la beauté , dans l'harmonie , dans la solitude . Les autres , elle s'en fichait éperdument .

Quand le soleil eut fini sa course folle dans le ciel , elle leva les yeux vers lui . Ses yeux si étranges , si sombres . Après tout , ils reflétaient assez bien sa personnalité : croyant dur comme fer au pouvoir de l'ombre , elle ne cherchait pas la lumière . Sa personnalité n'était pas lumineuse d'ailleurs . Elle ne respirait pas la joie de vivre , elle se contentait de vivre ( dangereusement certes , mais le gout du risque est une deuxième passion chez elle ) et ça lui allait très bien . Elle n'était pas drôle , mais son rire était si chantant , si joli , comme une clochette qu'on sonne , que le délivrer que de temps à autre lui suffisaient . Elle n'était pas très réfléchie , mais elle savait se sortir de toutes les situations sans trop de mal , et les improvisations lui réussissaient .
Elle n'était pas très ...

Un bruit , à sa droite , coupa le cours de ses pensées .
Un bruit familier .
Un bruit animal .
Un bruit de respiration .